Paris-Plages Le Parisien
17/08/04

Paris-Plages : quel succès !

Loisirs : en quatre semaines, 3 millions de Parisiens et de vacanciers – 700 000 de plus qu'en 2002 – ont fréquenté les installations de ce qui est devenu, en deux ans, le rendez-vous incontournable de l'été dans la capitale. Une véritable réussite, d'autant plus appréciée des promeneurs que la canicule a durement frappé Paris. L'an prochain, l'opération pourrait s'étendre à d'autres quais de la Seine ou à de nouveaux lieux de détente dans la ville.

Jean-Christophe Choblet a créé la plage à Paris

Son nom est peu connu. Pourtant, trois millions de personnes ont profité de « sa » création depuis un mois. Jean-Christophe Choblet, 36 ans, scénographe, est le concepteur de Paris-Plages. Appelé en mars 2002 par la Mairie de Paris pour imaginer la première opération balnéaire de la ville, il se voit assigner deux objectifs par Bertrand Delanoë : d'une part, concevoir un espace libre et gratuit pour le plus grand nombre sur la voie Georges Pompidou . D'autre part, réaliser un rêve : la plage . « Je l'ai pris au mot. Il nous fallait tous les symboles de la plage. » Le décor est planté : des cabines en bois, un peu de sable sur la route, des oriflammes pour le vent. Les couleurs ont la vedette. Quant il dessine, il les pose tout de suite. Et raconte : « La première année, on a été très embêtés. On a pris les photos du site en hiver, il n'y avait pas de feuilles aux arbres ». Le grand classique des stations balnéaires, presqu'un code à l'adresse des touristes, est respecté : des rayures verticales bleu et blanc. Certains égratignent ce flagrant délit de « Monsieur Hulot à la plage », droit sorti de l'univers de Jacques Tati. «  Les gens n'ont qu'un mois pour venir ici. Il fallait créer l'envie tout de suite », se borne-t-il à répondre.

L'asphalte, je connais bien

Pour mener l'opération à bien, il enrichit son équipe d'un architecte et d'un urbaniste, chargés d'inscrire le projet dans la ville. Un sociologue trouvera aussi sa place, pour aller à la rencontre des désirs des futurs visiteurs. C'est que Choblet aime travailler en équipe. Une escale aux Jeunesses communistes lui a donné le goût des autres et de la fête partagée. Avec le succès, il nourrit d'ailleurs une angoisse : que ses collaborateurs n'aient pas la reconnaissance qu'ils méritent. Cinq personnes l'accompagnent à plein temps. « Je ne travaille pas tout seul. Il faut une tête, mais je n'admets pas qu'elle annule l'ensemble. »

Elevé au sirop de la cité, aux Roses-Rouges de Villejuif, ce faux calme lâche, sans misérabilisme : « L'asphalte, je connais bien ! Dans une cité, l'espace public- un résidu au milieu des bâtiments- c'est de la pelouse et un bac à sable. Généralement, la commune n'a pas les moyens d'entretenir le sable. Et le gazon est vite grillé. » Reste la coulée noire et sèche de la route. S'il n'avait aucune contrainte budgétaire pour Paris-Plages, il l'effacerait.

En 2004, s'il est encore à la barre du projet, il s'occupera en priorité des enfants. «  Cette année, on a raté l'espace enfants. Comme il n'existe pas vraiment de beaux jeux pour eux, j'ai essayé d'en dessiner. Je me suis planté. En voulant cacher les jeux, je les ai enfermés. C'est un contresens : à Paris-Plages, tout doit être ouvert. »

C'est ainsi que chaque édition apporte son lot d'apprentissages. Le sociologue Roger Perrinjaquet a étudié la première. « Il a remarqué, par exemple, que les gens pique-niquaient dans le square de l'Hôtel de Ville. On y a donc installé une aire à cet effet cette année. » Pour les hamacs, situés après le pont Louis-Philippe, « un mec tendait sa toile là, entre deux arbres. Tout le monde bavait d'envie. »

« Paris-Plages se vit plus qu'il ne se regarde »

Ce chaudron de bonnes idées a ensuite été superposé au récit d'une journée à la plage, composé par Valérie Thomas, dramaturge de théâtre. « Il fallait inventer une histoire » Le pari n'était pas mince : convertir une autoroute en lieu à vivre, et sans répartir des ghettos au long du parcours, sans créer des coins pour les vieux d'un côté, les jeunes de l'autre, les homos et les hétéros, les sportifs et les vélos. L'équipe réfléchit déjà à 2004 ‘  A chaud, on a plein de bonnes idées », dit-il. Perrinjaquet est venu quelques jours cette semaine. Un photographe a fait de portraits. Il n'y aura pas de paysage. Pourquoi ? » Paris-Plages se vit plus qu'il ne se regarde. C'est pourquoi il ne me viendrait pas à l'idée d'aller voir à quoi ça ressemble depuis l'autre rive de la Seine. »

Tenace autant qu'angoissé, attentif à tout, Choblet voyage. Sa bourlingue est professionnelle, il change de pays pour ses projets. L'Allemagne où il collabore à l'exposition universelle de Hanovre en 2000. La Hongrie, où il prodigue actuellement ses conseils pour Budapest-Plage. Il rentre chez lui en TGV, à côté de Nîmes. Le trajet dure 3 h 15, et c'est presque trop court pour faire la transition avec Paris. « C'est en rentrant à Nîmes que je suis bousculé. Je réalise la différence des rythmes de vie. »

Et pour un dernier pique-nique à Paris-Plages ? Il imagine déjà. « J'emmènerais d'abord des amis. Un vin de mon coin, le pIc Saint-Loup, et, vu la chaleur, une anchoïade, avec une tapenade sérieuse. On aura bien mangé et bu, discuté beaucoup et on se sera engueulés tout autant. » Pour finir, repos. «  Depuis que je vis dans le sud, j'ai appris à faire la sieste. » Epicurien en plus.

Julie Cloris, Le Parisien, le 17/08/04

 

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